La cuisine au masculin
Confinement oblige, nous avons tenu un conseil de famille, je sais tout de suite les grands mots. Pour résumer, nous sommes passés en mode organisation et avons décidé de nous répartir les rôles.
A l’unanimité comme tout le monde se souvenait de mon mémorable gigot d’agneau que j’avais préparé pour Pâques l’année dernière, j’ai donc été nommé cuisinier en chef. Ça tombe bien, faire la cuisine n’est pas pour me déplaire.
Donc aujourd’hui, les papas, les mamans sont aussi les bienvenues, je vais vous donner quelques conseils pour ne pas être très vite débordés.
Faire la cuisine tous les jours, midi et soir, ce n’est pas comme préparer le plat de l’année une fois tous les cinq ans…
Il va falloir tenir la distance, donc inutile de partir au grand galop, de sortir toutes les marmites de mamie et à mettre la cuisine à feu et à sang… Ça va se jouer sur la longueur, l’organisation, une bonne gestion des produits et pas mal d’astuces. Le coup du papa cuisinier d’un soir qui veut remporter le prix de camaraderie auprès de ses enfants en leur servant le célèbre combo frites escalopes cordon bleu, ça ne va pas le faire longtemps. Donc inutile de dévaliser le congélateur, garder l’option pour les soirs où vous êtes en manque d’idées, ce qui arrivera forcément.
Petite contrainte supplémentaire qu’il ne faut pas négliger, les ingrédients. En cette période particulière, vous ne pouvez pas descendre 3 ou 4 fois par jour chez vos commerçants préférés. Il faut être rigoureux sur la gestion des stocks. Il va falloir faire avec ce que vous trouverez, donc ne compliquez pas la situation en voulant absolument faire goûter à la famille votre célèbre sauté d’agneau aux combavas et gingembre frais. C’est le moment de faire l’inventaire dans vos flacons d’épices, vous allez probablement dénicher des trésors insoupçonnés comme cet assortiment de 5 poivres. C’est peut-être le moment de s’en servir, tout comme le gingembre en poudre dont il vous reste 3 flacons neufs… au cas où. Il faut donc commencer par regarder ce qu’on a dans les placards et le réfrigérateur. Sélectionnez les produits frais, les légumes qu’on a achetés en grande quantité il y a une semaine, toujours au cas où… ainsi que la viande et les laitages. Afin de ne pas gâcher, on va privilégier la préparation des aliments en fonction de leur date de fraicheur ou, pour les légumes et les fruits, de leur état de conservation. C’est donc le moment de sortir les choux fleurs que vous avez acheté. Et c’est là où toute votre créativité va se montrer utile. Parce qu’il est hors de question de faire 4 kilos de choux fleurs à la vapeur que vous allez servir midi et soir pendant 48h et peut être même au petit déjeuner. Il faut varier les menus ! Je propose qu’une partie soit réservée crue en petits bouquets pour l’apéritif, une seconde partie en velouté au cumin à déguster froid et le reste en gratin avec du roquefort.
Mais avant toute chose, une cuisine n’est pas un champ de bataille, ni avant, ni après, alors si vous devez y passer du temps quotidiennement, je vous conseille de garder l’endroit propre et bien organisé, tout le monde n’a pas la chance d’avoir une cuisine grande comme un terrain de football, j’exagère… disons grande comme un terrain de volley !
L’hygiène d’abord
Vos ustensiles doivent être parfaitement lavés ainsi que les surfaces de travail, les légumes rincés, les produits frais conservés dans un endroit réfrigéré et les mains propres.
Il faut prévoir vos menus à l’avance, partir de ce que vous avez sous la main, plutôt que de vous lancer dans des recettes improbables dont il vous manquera la moitié des principaux ingrédients. Alors pour éviter ce genre de mésaventure, tenez compte de ce qu’il y a. Par exemple, les restes d’un poulet que vous avez servi rôtis la veille seront parfaits pour une salade César, cela vous permettra d’utiliser le pain rassis et que vous allez transformer en délicieux croûtons ainsi que le sachet de salade dont la date de fraicheur ne tient plus qu’à un fil. Et c’est peut-être l’occasion de tester la sauce César faite maison, cherchez bien, je suis sûr qu’il vous reste des œufs, un sachet de parmesan râpé rescapé au fond du tiroir du réfrigérateur, un malheureux citron qui devrait arriver à vous fournir la cuillère à soupe de jus nécessaire et la bouteille de sauce Worcestershire dont vous vous êtes toujours demandé à quoi ça servait.
C’est peut-être l’occasion de redécouvrir des ingrédients auxquels vous ne pensiez pas. Ce pauvre sac de lentilles, par exemple, celles que personne ne veut manger, le moment est venu de s’en occuper. Essayer les en salades, avec des petites tomates cerises. Rajouter le concombre en petits dés, émincez un oignon rouge, compléter avec un poivron coupé en morceau si vous en avez un sous la main et mélanger des cubes de féta nature.
Et comme vous êtes un homme prévoyant vous avez gardé le reste de lentilles pour en faire un délicieux consommé froid avec de la menthe et la coriandre. Ça fera une entrée parfaite.
Ne pas hésiter à faire plus.
Je m’explique, ce soir vous avez décidé de faire du poisson (en plus ça fera de la place dans le congélateur), pas de panique, une recette simple, au four avec des petites tomates, un filet d’huile d’olive et juste mouillé avec du bouillon ou du vin blanc. Vous allez servir le plat avec un écrasé de pommes de terre au romarin. Pour ce faire, je vous conseille de réquisitionner le jeune confiné devant son ordinateur et de lui proposer de se dégourdir les doigts en épluchant quelques légumes en compagnie de son père bien aimé. Devant sa bonne volonté évidente, glisser également le sachet de carottes à éplucher, elles seront parfaites façon vichy pour un futur repas. Quant au reste des pommes de terre, au four ou en salade, elles feront l’affaire.
Profitez de ce moment de communion familiale pour peler quelques oranges que vous découperez en fines tranches et servirez en carpaccio avec de la cannelle et un peu de fleur d’oranger.
Le secret, c’est avant tout de varier les menus et en ces périodes de confinement, de ne pas manger trop gras ni trop calorique. Il faut des repas équilibrés et si possible qui plaisent à tous. Tenir la distance, ne pas s’essouffler et pour ce faire, revisiter les classiques avec une touche de modernité. Il faut que les repas soient des moments conviviaux et agréables. Des plats simples avec une pincée de créativité qui feront de vous le chef cuisinier incontesté de la maison.